L’inarrêtable « yogaïsation » du monde…
Ce terme imagé a été inventé il y a quelques années pour saluer l’appétence marquée des cités occidentales pour l’art de vivre à l’asiatique : le yoga en est une illustration saisissante puisque le nombre d’adeptes a grimpé de 3 millions de pratiquants en France en 2010 à 10.7 millions actuellement soit plus de 20% de la population & une progression de plus de 300% ! (*) L’univers food n’est pas en reste : au delà des omniprésents sushis, on a vu déferler dans nos restaurants et même nos cantines tout un monde de saveurs en provenance de l’Est… En 2019, 22 % des Français consommaient déjà des spécialités asiatiques plusieurs fois par mois, selon une étude publiée par Statista et notre consommation de sushis est la plus forte d’Europe avec 8.4 kg dévorés ( !) par personne et par an. Côté restauration, on estime à 10% la part de marché de la restauration asiatique, avec plus de 2000 restaurants de sushis et une belle croissance de 8 à 10% par an selon Sushionline Magazine... Parmi les raisons qui expliquent ce succès, l’image de santé et de fraîcheur -surtout pour le sushi- l’accessibilité économique, la variété des recettes proposées et le développement des voyages sont les plus évidentes…
L’Avenir : Montée en Gamme et effet Zoom
Si la restauration asiatique s’est segmentée avec le développement par exemple des buffets japonais all you can eat ou des échoppes à poulet frit coréen, qui font la joie des GenZ & Millenials citadins, la sophistication des propositions est aussi au menu, pour satisfaire les attentes de clients désireux de retrouver des prestations plus authentiques & plus représentatives du style oriental. On peut ainsi saluer à Paris – et depuis peu à Marseille- le travail de la Bao Family qui a révolutionné la perception de la cuisine chinoise avec une proposition culinaire très étudiée autour de dim sums et baos aux saveurs inédites à savourer dans des décors évoquant « la maison traditionnelle chinoise ». Street Bangkok en zoomant sur la street food thaïlandaise fait lui le pari réussi d’une offre ultra-moderne et accessible en électrifiant par son service, sa communication et ses décors les classiques du genre : canard laqué, currys, grillades… Cette recherche de vérité et de raffinement devrait largement se poursuivre si l’on en croit les exemples piochés dans des pays ou l’asiatisation est un phénomène déjà ancien.
Nos inspirations pour imaginer les concepts asiatiques de demain…
Le « Brokamase » démode le Steakhouse haut de gamme
Aux États Unis, le format okamase – la dégustation à la japonaise d’une sélection de plats choisis par le chef- a été rebaptisé, par Peter Wells l’influent critique gastronomique du New York Times, « Brokamase » car il remplace pour les sorties entre hommes aisés – les Bro pour Brothers- le trip viandard au steak house XXL… Ces prestations très théâtralisées préparées devant le client au comptoir à des prix plus qu’élevés -un dîner pour 2 peut excéder 1000$…- satisfont leurs attentes d’affirmation de leur statut social tout en démontrant leur expertise culinaire, avec en prime force protéines au menu.
Un des hérauts de la tendance, Sushi by Scratch compte 10 mini-comptoirs ultra-lookés à travers le territoire où il propose des nigiris d’une finesse exceptionnelle, transcendés par des touches audacieuses comme l’ajout de pudding au maïs ou de chapelure au levain pour sublimer une tranche d’hamachi… Une expérience disponible at home pour $375 par personne, avec pairing boissons pour $225…
Dishoom propulse la gastronomie indienne au firmament des tendances britannique
On ne présente plus Dishoom, la perle lifestyle imaginée en 2010 par deux frères d’origine indienne pour associer les musts de la gastronomie du pays en version contemporaine & l’authenticité raffinée des décors des cafés Iraniens. Le pari de l’adaptation de spécialités « exotiques » aux pratiques londoniennes très citadines à des prix abordables proposées dans des établissements incroyablement stylés -jusqu’au service dans l’assiette- s’est avéré 100% gagnant. Les 10 établissements de Dishoom ne désemplissent pas à toute heure de la journée et les spécialités qu’ils ont inventées comme les Naan Rolls du petit déjeuner, leur chai maison ou leur dal «noir» figurent au palmarès des must eat des villes où ils sont implantés : Londres et désormais Edimburgh, Birmingham & Manchester…
Din Tai Fung : Une faim de loup !
La poussée asiatique est aussi portée par l’arrivée de chaines à l’appétit bien aiguisé… Créé à Taïwan dans les années 70, Din Tai Fung célèbre l’art du Dim Sum dans ses 170 restaurants implantés dans 13 pays. La raison de ce succès c’est son engagement très strict sur la qualité, qui l’a différenciée de ses concurrentes : l’enseigne de Hong Kong a même été récompensée par une étoile Michelin et le réseau compte plusieurs Bib Gourmand.
Au menu trônent toujours les Xiao Long Bao des débuts, des raviolis circulaires à la vapeur contenant du crabe ou du porc et un peu de bouillon mais d’autres parfums ont enrichi la gamme : poulet, truffe ou champignons. Depuis 2018, Din Tai Fung régale les Londoniens dans ses 3 restaurants: celui de Tottenham Court Road est une vraie réussite avec un décor qui allie les références à l’héritage du quartier, swinging sixties et style brutaliste, une belle vue panoramique et l’art de la dégustation à la taiwanaise. On l’attend avec intérêt à Paris alors que l’enseigne vient d’ouvrir le plus grand établissement de son réseau à New York…